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Beykush, le vin ukrainien primé au concours Decanter à Londres

C'est une information qui apporte un peu de joie aux Ukrainiens dans la tourmente de la guerre. Le concours de vins Decanter a décidé de primer avec une médaille d'or un vin ukrainien. Son nom : Beykush. Il est produit sur la côte de la mer Noire, à la lisière de la zone occupée par les Russes.

La tension est palpable et rappelle que la guerre est toute proche. Evhen Schneideris, fondateur et propriétaire du domaine, ainsi que sa directrice générale, Svitlana Tsybak, ont dû mobiliser toute une chaîne logistique pour faire parvenir leur précieux breuvage à travers l'Europe jusqu'à Londres. Une opération digne d'un roman d'espionnage !

Un long chemin jusqu'à Londres

C'est la troisième fois que Beykush participe au prestigieux concours Decanter World Wines Awards (DWWA), toujours avec les mêmes problèmes de visas et de transport. Mais cette fois, c'est la guerre. Les vignes, nichées dans un cadre bucolique entre l’estuaire de Berezan et la baie de Beykush, ont par chance été épargnées par les attaques russes visant la ville voisine de Mykolaïv, à 60 km de là. Mais faire parvenir ces vins à l'autre bout de l'Europe relevait de l'impossible.

Il a fallu deux semaines pour faire passer les caisses de vins, une à une, par la frontière hongroise. L'homme qui devait les acheminer vers le Royaume-Uni s'est désisté. Un Ukrainien habitant à Londres s'est alors porté volontaire : il a rempli ses valises avec 30 bouteilles de vin et les a finalement livrées à bon port.

Dégustation à l’aveugle

Le vin blanc en question, Reserve Chardonnay, n'a bénéficié d'aucun passe-droit. Chaque vin participant à la compétition est jugé à l'aveugle. Les Ukrainiens ont juste été dispensés de payer les frais d’inscription. Le score obtenu (95 sur 100) et cette médaille d'or récompense un travail difficile en temps de guerre dans les vignes et ailleurs. Car outre le travail dans les vignes et dans le chai, Beykush organise aussi l'accueil des réfugiés ukrainiens dans les vignobles à travers l'Europe.

Beykush abrite un petit vignoble familial. Au plus haut des vendanges le domaine emploie dix-sept personnes. « Notre région est pilonnée nuit et jour, alors on travaille quand on peut », soupire Svitlana Tsybak, la directrice générale. Une partie de l’entrepôt où sont stockés les vins avant leur expédition a été mise à l'abri en Ukraine occidentale. De là-bas, les précieuses bouteilles devront être acheminées vers leur importateur britannique. Le domaine produit entre 700 et 900 bouteilles par an. Une production de niche.

Mais c’est une aussi une entreprise florissante à laquelle la guerre a mis un sérieux coup de frein. À cause de blocage russe de la mer Noire, les exportations ne peuvent pas se faire par la mer. Le vin reste dans les cuves et les barriques. Les matières sèches, telles que les bouteilles en verre, les cartons, les capsules en métal qui recouvrent les bouchons ou encore les étiquettes manquent. La seule usine de la région qui produisait les bouteilles a été détruite. Beykush, lui, faisait venir ses bouteilles d’Espagne. Désormais, c'est impossible. Les vignerons tentent de s’approvisionner en Moldavie voisine.

Sur le chemin du progrès

Les temps sont difficiles, mais le domaine continue coûte que coûte. À l'époque de l’URSS, l’Ukraine, la Géorgie et la Moldavie fournissaient du mauvais vins sur le marché soviétique dont elles faisaient partie. Depuis la chute de l’Union soviétique en 1991 et l’indépendance de ces pays, les domaines viticoles ukrainiens, géorgiens ou moldaves ont dû reprendre le chemin du progrès. Il fallait attirer des investisseurs étrangers. Grâce à leur argent, ces vins venus des confins Est de l’Europe ont grandement gagné en qualité.

Paradoxalement, l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014 et la chute du rouble à l’époque ont forcé les producteurs ukrainiens à chercher de nouveaux marchés en Europe occidentale et dans le monde. Les salons professionnels tels que Vinexpo Paris Wine Paris ou Prowein en Allemagne témoignent d’un intérêt naissant des distributeurs pour ces vins, souvent issus des variétés de raisin autochtones. Mais cela est une autre histoire…

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