Burundi
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Vaciller mais avancer

Pour un journaliste, savoir que son travail est accessible à ses auditeurs, ses lecteurs ou téléspectateurs est très important. Pendant plus de cinq ans, on nous lisait comme par effraction. Pour rappel, depuis le 10 octobre 2017, les lecteurs d’Iwacu n’ont pas pu accéder à son site en ligne ou sur le téléphone portable à partir du Burundi. Au début, on a pensé à un problème technique qui pouvait être réparé incessamment. Des jours ont passé sans solutions. Qui a bloqué le site et pour quels motifs ? Personne n’a voulu assumer. Cette situation a profondément préoccupé nos lecteurs et les organisations des professionnels des médias.

Certaines s’en ont pris par ailleurs au gouvernement : « Si les autorités burundaises sont responsables de cette restriction, cette décision constitue une violation significative de la liberté de la presse dans le pays… Les autorités devraient annuler ces restrictions immédiatement et garantir le droit fondamental à la liberté d’expression et à la presse ».

Il fallait passer par des subterfuges techniques et autres VPN. C’est très bien tout cela, c’est l’assurance que la censure complète n’existe plus. C’est une excellente nouvelle. Mais cela laisse malgré tout un sentiment étrange. Comme si nous étions « nocifs », comme s’il fallait protéger les Burundais d’Iwacu. Désormais, Iwacu est de nouveau accessible au Burundi et aux Burundais. C’est le soulagement chez Iwacu. C’est une très bonne nouvelle. Toutefois, je tiens à rappeler que ce n’est pas une faveur, c’est un droit recouvré.

Je voudrais souligner un aspect souvent oublié par le public. L’information a un coût. Un journaliste qui va en reportage doit avoir un moyen de déplacement, il doit se loger, se restaurer, communiquer. Aujourd’hui, je suis obligé d’annuler des reportages, des enquêtes, faute de moyens.

Oui, le blocage du site internet a eu des conséquences terribles sur les ressources publicitaires. Iwacu va mal. Très mal. Je n’ai aucune honte à le dire. C’est dur chaque jour de gérer et la pression de la recherche de l’information et la question de la survie.

Avec l’ouverture du site, nous espérons retrouver les annonceurs. C’est une vraie bouffée d’oxygène car la situation est très difficile.

Malgré tout, je retiens quelques leçons de cette pénible situation.
D’abord, la crédibilité du journal est restée intacte. Ce que nous arrivons encore à faire, avec le peu de moyens, nous le faisons bien. Chapeau à tous mes collègues qui continuent leur sacerdoce dans des conditions difficiles !

Ensuite, je rappelle que malgré ce blocage, le site Iwacu est resté de loin le plus consulté de tous les sites burundais. C’est un signe fort.

Enfin, « last not least », ce qui ne vous tue pas vous rend fort. Iwacu sort renforcé de cette épreuve.
Tout n’est pas gagné, nous vacillons, mais nous avançons…