Burundi
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L’institution des Bashingantahe par les temps qui courent…

Nos ancêtres nous ont légué une institution, destinée à former des repères vivants de l’Ubuntu (l’humanité accomplie). Ils y ont inscrit un idéal de perfection humaine à prendre très au sérieux.

La famille nucléaire, qui se faisait investir par les Bashingantahe, jurait solennellement d’être responsable de la vérité et du bien commun autour d’elle, partout où les concernés se trouvaient. Qu’ils soient seuls ou parmi d’autres, qu’il vente ou qu’il pleuve.

Ce serment se nommait ’’ukwatirwa’’, c’est-à-dire être investi Mushingantahe. Par-là, le nouveau Mushingantahe concluait un accord avec la population, pour que celle-ci exige cela de lui par la suite.
Entre temps la colonisation mentale et des tueries mutuelles récurrentes s’en sont suivies. Des mésaventures ont alors émaillé l’histoire de notre pays ; et ont mis à mal l’institution des Bashingantahe.

Des Bashingantahe, investis traditionnellement dans toutes les provinces, ont ainsi pris l’initiative de réhabiliter cette prestigieuse institution. Aujourd’hui elle est debout, avec des comités élus sur les collines, dans les quartiers urbains, dans les communes, dans les provinces et au plan national.

Or, parmi les tâches dévolues à l’institution des Bashingantahe, il y avait celle de dirimer les conflits et de trancher les litiges. En cours du temps alors, le Gouvernement du Burundi a jugé bon de prendre en main cette tâche, la justice judiciaire du pays lui incombant.
Aujourd’hui, il vient de parachever ce projet en faisant élire les notables pour trancher les litiges sur la colline et dans les quartiers urbains.

Nous autres les Bashingantahe, investis traditionnellement, nous avons déjà dit que cette mesure est à respecter et à soutenir. La justice judiciaire est une tâche qui revient à l’Etat, comme il vient d’être dit. Qui dit Etat ne dit pas seulement gouvernement, bien entendu.

Les sages traditionnels, que nous sommes, saluent donc les Notables des collines et des quartiers urbains. Ils continueront toutefois à exercer les autres tâches qui leur ont été transmises par les ancêtres.
Du reste, ils n’avaient pas seulement à trancher les litiges. Ce devoir ne s’imposait d’ailleurs que quand les nombreuses autres activités des Bashingantahe avaient échoué.

L’essentiel, pour eux, aujourd’hui comme hier, c’est surtout de promouvoir l’écologie des moeurs, en prêchant par l’exemple dans la vie individuelle, familiale, sociale et citoyenne.

La charte des Bashingantahe, en vigueur au sein de l’Institution depuis sa réhabilitation, énumère ainsi une dizaine de tâches de ce calibre, qui sont d’ailleurs précieuses pour le pays ; et présagent la complémentarité à ce sujet.

Se faire investir Mushingantahe, c’est en effet s’engager à faire des efforts en vue d’être un citoyen modèle. Nos ancêtres ont visé haut. Il faut vraiment leur rendre hommage à cet égard et à bien d’autres.

Aujourd’hui évidemment, il ne s’agit pas de copier la tradition, si noble soit-elle ; mais de compléter la modernité par cet héritage ancestral, combien solide et emballant.

Les efforts en cours le montrent bien. Et ils iront loin. Mon dernier l’ouvrage, « Les Bashingantahe, repères vivants de l’Ubuntu », peut aider à cerner les précieux enjeux contenus dans cet héritage, qui, du reste, s’inscrivent dans la dynamique actuelle du monde entier, visant à valoriser le patrimoine culturel des Peuples.

Pr Abbé Adrien Ntabona