Burundi
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Adrien Sibomana : « l’Ubushingantahe, c’est l’âme du peuple burundais »

Dans une note rendue publique ce mardi 13 septembre, le ministère en charge de l’Intérieur a annoncé que les activités des Bashingantahe cessaient dès le 15 septembre à la prestation de serment des notables collinaires élus. Adrien Sibomana, président de l’Institution des Bashingantahe, estime que les Bashingantahe ne vont tout simplement plus rendre justice et que leur rôle va se poursuivre pour des litiges mineurs.

Votre réaction à l’annonce du ministère chargé de l’Intérieur ?

J’aimerais d’abord dire que les Bashingantahe, c’est une tradition, un comportement social accepté par tout le monde. Le conseil collinaire, c’est un tribunal. L’Etat peut décider de créer un tribunal et le mettre où il veut.
Mais ce que les gens ont mal compris c’est qu’un Mushingantahe ne cessera pas de se comporter comme un Mushingantahe parce qu’il y a un nouveau tribunal. L’activité d’ubushingantahe est permanente puisque c’est un comportement et aucune loi ne peut l’enlever. Ubushingantahe, c’est l’âme du peuple burundais.

La mise en place d’un nouveau tribunal ne veut pas dire la suppression de l’institution des Bashingantahe, car leurs activités sont essentiellement liées à leur comportement dans leur milieu. Donc, les Bashingantahe vont continuer d’exister, mais pas comme un tribunal.

Souvenez-vous qu’avant il y avait des assesseurs et que les tribunaux de résidence exigeaient que certaines litiges passent prioritairement par les Bashingantahe.

Maintenant, ce seront les nouveaux tribunaux qui vont traiter des affaires susceptibles d’être reçues par les tribunaux classiques.

Concrètement, cela veut dire que les Bashingantahe vont rester au service de ceux qui vont aller vers eux ?

Très concrètement, si vous et moi entrons en conflit, sommes-nous obligés d’aller au tribunal ? Si nous trouvons deux ou trois personnes aptes à nous arbitrer pour trouver une solution, qui peut nous l’empêcher ? Les Abahuza (médiateurs) vont notamment traiter de litiges pénaux que les Bashingantahe ne traitaient pas jusqu’ici.

Les Bashingantahe vont donc continuer à exister parce que c’est leur comportement social qui est recherché que leurs capacités de juge.

Quelles sont les valeurs qui sont reconnues au Mushingantahe ?

C’est quelqu’un qui a une certaine personnalité et qui doit dire la vérité quel qu’en soit le prix. C’est quelqu’un qui est correcte, qui n’est pas injuste, qui n’est pas paresseux, qui n’est pas ivrogne, bref le Mushingantahe est un modèle dans la société. Dans le temps, quand quelqu’un manquait de semences, on lui disait d’aller en chercher chez le Mushingantahe qui lui en donnait.
Le Mushingantahe doit être aussi autonome, ce qui veut dire qu’on ne peut introniser un mendiant même s’il dit la vérité, car sa vulnérabilité l’expose à de la corruption.

Le Mushingantahe protège la veuve et l’orphelin face à des injustices, en gros, c’est l’Ubuntu (l’humanisme), un idéal, une tradition perfectionniste.

L’Umuhuza sera-t-il nécessairement reconnu comme ayant des valeurs ?

La charte qui régit les Abahuza est calquée mot sur mot à celle des Bashingantahe. C’est une joie pour nous que les valeurs que nous mettons en avant soient exigées pour ces gens. Et s’ils ne les respectent, l’administration va sans doute les démettre.