Madagascar
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MADAGASCAR. DINAN’NY RANO POUR PROTEGER LES INFRASTRUCTURES D’EAU POTABLE DANS LE GRAND SUD

Contexte


Le Grand Sud de Madagascar fait régulièrement face à des épisodes de sécheresses de par la faible pluviométrie moyenne de cette région et la forte variabilité des cumuls de pluie d’une année à l’autre. La fréquence de ces épisodes de sécheresse paraît s’accélérer ces dernières années et une baisse de la pluviométrie annuelle a été constatée durant les dernières décennies. Ces changements environnementaux sont, en partie, dus aux effets du changement climatique et les projections réalisées anticipent une aggravation de ces impacts dans les décennies à venir.

Le Grand Sud a ainsi été frappé par des épisodes de « Kéré » (famine endémique) particulièrement intenses pendant les saisons sèches (« Ain-tany ») entre 2016 et 2018 ainsi qu’en 2020-2021. Ces sécheresses ont provoqué l’assèchement des rares points d’eau exploitables, ayant contraint les habitants à marcher jusqu’à 10 ou 20 km pour s’approvisionner en eau. Les communautés ont alors utilisé les rares sources d’eau disponibles (eau de surface, de puits non protégés, voire d’impluvium), en général fortement contaminées. Une spéculation sur le prix de l’eau a été observée et le prix d’un bidon de 20 litres d’eau non potable a grimpé jusqu’à 2.000 Ariary et plus, alors que le prix de l’eau potable dans la capitale, Antananarivo, est 100 fois moins élevé !


L’heure n’est pas, n’est plus à énumérer les raisons de toutes exactions commises pour empêcher la seule et unique solution pérenne pour résoudre ce problème d’eau dans le grand Sud de Madagascar. Dans ces régions, ce n’est pas l’eau qui manque. Tout était, est question de drainage, de répartition et de gestion. Il faut se souvenir qu’en 1996, le Japon, à travers la JICA (Agence japonaise de coopération internationale) avait mis en place, à Ampotaka, un pipeline de transfert d’eau long de 142 km, ayant desservi les districts de Beloha et de Tsihombe et traversé six communes : Marolinta, Beloha, Tranovaho, Marovato, Nikoly et Tsihombe. Deux ans auparavant, en 1994, en partenariat avec l’Unicef et le CPGI, avait été créé l’AES (Alimentation d’Eau dans le Sud), un organisme d’Etat destiné « à réduire le manque d'eau en gérant les ressources en eau et l’alimentation en eau potable ». Durant 25 ans, la gestion de l’AES a périclité. Pour l’Unicef, et de manière très diplomatique : « La gestion du service par l’AES était fortement déficitaire, ne répondait plus aux besoins de la population et n’avait pas assuré les maintenances et renouvellements nécessaires à la pérennisation du service ». Ce premier pipeline, construit à Ampotaka, avait été « géré » pendant 25 ans par l’AES.


En 2016, lors des premières évaluations effectuées grâce au concours de l’Unicef, plus de la moitié aval du pipeline était sèche depuis plusieurs mois. Les pompes thermiques n’avaient pas été renouvelées et ne devenaient progressivement plus réparables. Si le génie civil était en bon état, les équipements électromécaniques étaient en fin de vie. Par ailleurs, les débits journaliers produits étaient nettement insuffisant au regard de l’augmentation de population constatées depuis plus de 20 ans. Les capacités de production et de transport d’eau sont devenues nettement trop faibles. Par ailleurs, le pipeline ne permettait plus d’alimenter les villages environnant, faute de connexions existantes et du fait que seul 01 camion-citerne, sur les 28 ayant existé, restait en état de fonctionnement. La gestion du service par l’AES était fortement déficitaire, ne répondait plus aux besoins de la population et n’avait pas assuré les maintenances et renouvellements nécessaires à la pérennisation du service.

Malgré la disponibilité des finances -4 millions de dollars hors taxes- et un remarquable travail d’ingénierie de terrain a été mené par l’équipe projet, en particulier Energie Technologie, Hery Rajaonarimampianina n’était plus Président de la République, lorsque le projet démarra. Ce, « malgré une très forte pression occasionnée par la volonté de toutes les parties prenantes de finalisation des travaux dans les délais les plus courts, accentuée par des programmations précoces d’inauguration au plus haut niveau », dixit l’Unicef.


Le 29 juin 2019, c’est le Président nouvellement élu, Andry Rajoelina, qui procéda à l’inauguration des travaux de phase 1 du pipeline Ampotaka. Mais, se rappelle l’Unicef, « il avait déjà fait l’honneur de visiter le projet en cours de travaux à l’occasion de sa première visite terrain suivant son élection, marquant ainsi l’importance accordée par l’Etat à ce projet. L’Ambassadeur du Japon, le Directeur Général d’USAID et l’Ambassade d’Allemagne, principaux financeurs du projet ont également participés à l’inauguration, accompagné du Représentant de l’Unicef ». Les phases suivantes se axées sur la réhabilitation du pipeline Mandrare-Sampona, ainsi que du pipeline de 90 km d’Ampotaka  à  Tsihombe.

Qui a dit que la continuité de l’Etat n’existait pas à Madagascar ? En tout cas, le Président Rajoelina a prouvé le contraire. Il a même repris des projets des Présidents Philibert Tsiranana et Didier Ratsiraka, totalement abandonnés par ses prédécesseurs...


Mais pour en finir définitivement avec cette histoire de « Kere » dans le Sud, le Président Andry Rajoelina avait déjà des idées à concrétiser en 2016. Oui, il y a 7 ans déjà. Lors de sa visite à Ebelo et Tsihombe, les 6 et 7 février de cette année, il avait reparlé des projets qui n’ont jamais abouti en plus d’un demi-siècle… A savoir : pipeline d’acheminement d’eau depuis la rivière Efaho jusque dans l’Androy ; pipeline allant du fleuve Mandrare à Sampona ; pipeline de Bemamba à Antaritarika; le projet de captage d’eaux depuis la rivière Tarantsy dans la région Anosy jusqu’à Ambovombe dans la région Androy, en passant par Amboasary Sud ; réhabilitation et amélioration des forages existants ; installation d’un système d’unités de désalinisation solaire ; renforcement du pipeline reliant Ampotaka à Beloha et Tsihombe ; extension du pipeline entre Ampotaka et Sampoina.

Voici des extraits d’un article que j’ai rédigé le 6 octobre 2020. En 1993, un an après le Kéré de 1992 (année où le regretté Daniel Ramaromisa, alors ministre des Transports et de la Météorologie avait organisé le premier téléthon dénommé S.O.S. Sud, diffusé directement à la TVM), Latimer Rangers, journaliste-écrivain d’origine Antandroy, alors ministre de la Culture, m’avait emmené avec lui pour me faire comprendre son idée : drainer les eaux du fleuve Efaho (à quelque 80 km d’Amboasary Sud vers Fort Dauphin) pour arroser la région d’Ambovombe, à travers un système de pipeline. A l’époque, je n’avais ni caméra ni smartphone et Internet n’existait pas à Madagascar pour l’information en temps réel. Si ce projet avait été réalisé, le grand Sud, à l’heure actuelle, serait déjà une oasis verdoyante. Si, seulement si… Car même les pipelines japonais ont disparus depuis belle lurette. Et personne n’a rien dit, comme si c’était normal.

Latimer Rangers remerciant le Président Andry Rajoelina, à Ambovombe

30 ans après, et après le passage des présidents élus Zafy Albert, Didier Ratsiraka pour la seconde fois, Marc Ravalomanana et Hery Rajaonarimampianina, Andry Rajoelina, Président de la République, a procédé au lancement du pipeline partant de la rivière Efaho pour arriver à Ambovombe. Soit 97 km. Latimer, originaire d’Antanimora Atsimo, peut partir serein…


En effet, le samedi 22 avril 2022, le Président Rajoelina a donné officiellement le coup d’envoi de ce pipeline qui aurait dû être construit depuis trois décennies au moins. D’un coût de 322.560.600.000 ariary les travaux sont prévus durer 330 jours.


Sans covid-19 qui a bloqué toutes activités de développement à Madagascar durant 20 mois, la continuité du colloque régional pour l’Emergence du Grand Sud, en juin 2021, aurait abouti au fonctionnement effectif de ce pipeline et, ainsi, l’approvisionnement en eau douce d’un demi-millions d’habitants des localités traversées par ce conduit d’eau géant, d’Esalo à Ambovombe.

Mais il est un volet sur lequel je voudrais attirer l’attention de tous, à commencer par les dirigeants présents et même à venir. Le vrai objet de ce dossier.

Oui, la phase 1 du pipeline Ampotaka, a été inaugurée fin juin 2019 et les premiers échanges techniques exploratoires sur la poursuite des travaux en phase 2, initiés en septembre 2019 entre l’Unicef et la Banque Mondiale, ont été prometteurs. Et encore oui, la Banque Mondiale a manifesté un fort intérêt pour appuyer la poursuite des travaux de transferts d’eau potable longue distance dans le Grand Sud de Madagascar.

Mais souvenons-nous : à peine la RN5 reliant Ambilobe à Vohémar construite que des actes de vandalisme y ont été perpétrés. Ce n’est que le seul exemple que je donne ici, à vous de lire les journaux, les réseaux sociaux et à regarder les chaines de télévision. Comment, dès lors, faire pour protéger ces pipelines qui coûtent tout de même chers à la nation malagasy ?

Il n’y a qu’une seule et unique voie, celle de la loi, partant aussi du principe que Madagascar est un état de droit, en anglais « Rule of law ». Il s’agit d’une notion juridique anglaise équivalente au concept d'État de droit. Elle pose la prééminence du droit sur le pouvoir politique. C’est-à-dire que quel que soit le dirigeant d’un pays donné, la loi permet de maintenir l'équilibre entre nos droits individuels et nos obligations à titre de membres de la société. Le meilleur exemple que j’ai trouvé est ce qui suit : quand une loi donne à une personne le droit de conduire, elle lui impose également l'obligation de savoir conduire et de respecter le Code de la route. Pourtant, nous sommes tous témoins de ce qui se passe dans les rues d’Antananarivo…

En annexe du rapport de capitalisation de projet de l’Unicef, de septembre 2021, j’ai trouvé le texte que je vous présente, ci-après, dans son intégralité, rédigé en français.

Il a été intitulé : « Règlementation sur la protection des infrastructures d’eau dans la région Androy par voie de Dina »

A mon humble avis, il n’est pas capital mais vital de le traduite en malagasy officiel et en langues vernaculaire utilisées dans les régions traversées par les pipelines. Car il est certain que la très grande majorité des populations du Grand Sud de Madagascar, ne parle ni ne comprend le français. Par ailleurs, j’ignore, jusqu’à présent, le mécanisme d’application d’un « Dina » (accord coutumier tacite), vis-à-vis des lois officielles. Ce que je sais, depuis que je suis journaliste -il y a… belle lurette- c’est qu’à Madagascar, il y a une foultitude de lois sans décret d’application.


Ici, je m’adresse au Chef de l’État actuel, Andry Rajoelina :

Monsieur le Président de la République, tous ces efforts de développement seront vains si le texte qui suit n’est pas pris en considération comme je le suggère plus haut et que je réécris : traduction de ce texte en langue malagasy officielle et en langues vernaculaires (l’Antandroy, l’Antanosy, le Mahafaly, le Bara…), et publication d’un décret d’application. Nul n’est censé ne pas savoir qu’à la différence des lois qui émanent du pouvoir législatif, les décrets et les arrêtés sont des actes réglementaires, pris par le pouvoir exécutif. Il ne doit y avoir qu'un seul mot d'ordre concernant tous les biens et infrastructures de développement publics : l'application stricto sensu de la LOI qui est l'ensemble des règles et des normes dans une société donnée. La  LOI est souvent, aussi, le terme générique pour tous les actes, où qu'ils soient dans la hiérarchie des normes (normes constitutionnelles, légales au sens formel ou strict, réglementaires...).

Enfin, jusqu’à la fin des travaux du pipeline Efaho-Ambovombe, séance hebdomadaire d’explication de ce texte dans les écoles et dans chaque Fokontany. Car nul n'est censé ignorer la LOI. A présent, regardez et lisez attentivement la banderole sur la photo qui suit :

Photo prise à Esalo, village à proximité du fleuve Efaho (ou Ifaho). Traduction du texte écrit en malagasy officiel et non en dialecte du Sud : Nous n'acceptons pas le transfert de l'eau de l'Ifaho vers l'Androy parce que cela ne nous est pas bénéfique. "Liberté d'expression" de pauvres villageois illettrés poussés indubitablement par des politocards égoïstes inconscients, loin des notions de Patriotisme et de Développement

Merci, Monsieur le Président.


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REGLEMENTATION SUR LA PROTECTION DES INFRASTRUCTURES D'EAU DANS LA REGION ANDROY PAR VOIE DE DINA