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Colombie: la gauche aux portes du pouvoir?

Ce dimanche 29 mai, la Colombie se choisit un nouveau président. Et pour la première fois dans l’histoire du pays, un candidat de gauche pourrait bien remporter le scrutin. À 62 ans, Gustavo Petro, ancien guerillero et vieux routier de la politique colombienne, est le grand favori des sondages.

De nos envoyés spéciaux à Cali, Stefanie Schüler et Damien Fellous

En Colombie où la corruption, l’exclusion sociale et la violence dominent toujours le quotidien, bon nombre d’électeurs aspirent aujourd’hui à un changement de politique. Mais ils ne seront probablement pas assez nombreux pour permettre à Gustavo Petro une victoire dès le premier tour. Sur la dernière ligne droite ses sympathisants jettent toutes leurs forces dans la bataille.

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« Nous sommes en pleine soirée de collage d’affiches et nous distribuons le programme de campagne », dit cette militante de gauche. Et quelle est la réaction de la population à la campagne de Gustavo Petro ? « Très positive ! Les gens klaxonnent et applaudissent quand ils passent en voiture. Ils crient : “Petro, premier tour !” Sur 100 personnes il y a une réaction négative. Les autres montrent tous leur soutien à notre présence ici », poursuit-elle.

Si l’ancien sénateur et ancien maire de Bogota, Gustavo Petro, est aussi populaire à Cali, c’est que la ville a été le bastion de la contestation sociale, le « paro » qui a secoué au printemps dernier l’ensemble de la Colombie et qui a été violemment réprimé par le gouvernement sortant.

« Nous avions faim. La pandémie et le confinement ont aggravé le chômage et le manque de nourriture pour les populations déjà défavorisées. Ç'a fait exploser la communauté. Mais avec le « paro » les gens ont pris conscience qu’ils avaient des droits dont ils peuvent exiger le respect. Aujourd’hui, cette lutte va donc se voir dans les urnes. Notre résistance se traduira en votes », témoigne, sous couvert d’anonymat, cette jeune femme qui a participé au soulèvement.

« Nous avons besoin d’un changement de politique »

En Colombie, plus de la moitié de la population vit avec moins de 3 euros par jour, et une majorité des Colombiens travaillent dans le secteur informel. Ivan Duque, le président conservateur sortant, n’a pas mis en œuvre les accords de paix signés en 2016 entre la guérilla des Farc et l’État colombien. La violence est de retour, en ville comme dans les zones rurales. Dans ce contexte, les idées progressistes de Gustavo Petro séduisent, y compris dans les rangs des intellectuels colombiens et de la classe moyenne. «Pour moi, Petro représente plus d’emplois, un meilleur accès aux soins, la possibilité pour tous les jeunes d’étudier avec des universités gratuites, une meilleure retraite pour les personnes âgées », dit Samara, une femme.

« La Colombie a tout ce qu’il faut pour que l’on vive mieux. Mais sommes les pires en tout : en termes de violence, de pauvreté, de narcotrafic. Nous avons besoin d’un changement de politique si nous ne voulons pas continuer ainsi », reprend sa mère.

Pour réduire les inégalités sociales, mettre fin à la violence endémique et protéger l’environnement, le favori des sondages promet un changement du modèle économique : à terme, Gustavo Petro veut réduire l’exploitation pétrolière, qui représente pourtant plus de la moitié des exportations colombienne, en faveur d’une économie basée sur l’agriculture et le tourisme.

Ses promesses de campagne sont nombreuses, mais le programme ne détaille pas les moyens pour y arriver. Certains électeurs du centre hésitent à accorder leur vote au candidat de gauche. C’est pourtant de ces voix centristes dont a besoin Gustavo Petro pour remporter la présidentielle.

Campagne de haine de la droite

De leur côté, les militants de Gustavo Petro s’inquiètent de la campagne de haine, initié par la droite colombienne sur les réseaux sociaux. Gustavo Petro y est comparé à Staline, Chavez et Castro. Sa candidate à la vice-présidence, l’afro-colombienne Francia Marquez à King Kong.

«Dans d’autres pays, il y a une alternance du pouvoir. Pas en Colombie. Ici nous avons 200 ans d’hégémonie de la droite. Et elle n’abandonnera pas le pouvoir aussi facilement », s’inquiète Sonia, une militante pro-Petro. «La droite occupe les postes dans toutes les institutions. Pour Petro, il sera donc très difficile d’appliquer sa politique. Le changement dont nous avons besoins va prendre des années », constate David, un autre militant.

Selon les derniers sondages, Gustavo Petro obtiendrait aux alentours de 40% des voix au scrutin ce dimanche. Un second tour semble donc probable : il opposerait le 19 juin le candidat de gauche soit à Federico Gutierrez, candidat de droite, soit à Rodolfo Hernandez, un candidat populiste indépendant.

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